Seborga
Il était une fois une principauté médiévale dont le prince Giorgio Ier ne devait son titre ni à ses ancêtres ni à ses exploits chevaleresques mais à l'acclamation de ses sujets. Seborga était un petit royaume perché sur les collines plantées de mimosas au-dessus de Bordighera. Le prince Giorgio Ier, son ministre des affaires étrangères et sa charmante garde du corps recevaient leurs visiteurs dans leur palais reconnaissable à la guérite bleue et blanche placée à l'entrée. Ils leur faisaient les honneurs de la demeure et leur contaient l'histoire de leur état.
En 954 le comte de Vintimille céda le fief de Sebrga à l'abbaye de Lérins qui l'érigea en principauté ecclésiastique. En janvier 1729, Victor Amedée II de Sardaigne acheta la principauté mais n'acquita jamais sa dette, ce qui permit à Giorgio Ier de revendiquer son titre de prince.
Ce temps jadis ne date pas du Moyen Age ni du XVIIIe siècle mais de la fin des années 90 où Giorgio réclama son indépendance à l'Etat italien, réalisant une magnifique opération médiatique à l'intention des touristes. Forte de sa nouvelle indépendance, tel David devant le Goliath italien, mieux que le village d'Astérix devant les Romains, la réputation de Seborga dépassa les frontières jusqu'aux antipodes. Lors du premier congrès des principautés à Seborga, les télévisions du monde entier, y compris d'Australie, se bousculaient devant les grilles du palais.
Le prince frappa monnaie, imprima des timbres et estampa des plaques minéralogiques pour les véhicules de ses sujets. Les achats se faisaient en lires puis en euros et au regard de l'Etat italien les timbres et les plaques n'étaient au mieux que de simples vignettes décoratives sans valeur légale.
Timbres édités par la principauté de Seborga
Malheureusement ces temps bénis sont révolus. Le prince Giorgio Ier est décédé, son ministre aussi et sa garde du corps que beaucoup d'élus aimeraient avoir dans leur service du protocole tient un magasin de souvenirs. Elle a d'abord écoulé les stocks du palais et vend désormais des figurines évoquant les fées Morgane et les templiers. D'ailleurs dans le village des pierres sculptées, des fresques ou une mosaïques rappellent la présence - réelle ou imaginaire je ne sais - en ces lieux des chevaliers de cet ordre. Depuis 2010 un nouveau prince a été
élu. C'est Marcello Ier.
Une ruelle couverte de seborga reliant la place de l'église à l'entrée du village
Seborga conserve cependant ses charmes. Il faut y aller en février quand les mimosas sont en fleurs. Le village est alors cerné d'une armée d'arbustes jaunes qui resplendissent sous le franc soleil d'hiver. Le dimanche matin, l'on est accueilli par les jeux des chiens qui courent dans les rues, les anciens assis devant la fontaine. On papote tranquillement entre passants et habitants accoudés à leurs fenêtres. Devant l'ancien palais, seule la guérite évoque les temps anciens, les chats cherchant le soleil ont remplacé les touristes.
Une des deux épiceries de Seborga
Après avoir enjambé quelques marches sous un passage voûté on débouche sur la place de l'église. Un monde en miniature : trois ou quatre arches abritent l'une des deux épiceries du village et une boutique de souvenirs font face à l'église dont la façade colorée aux pilastres en trompe-l'oeil et la figure de l'archange saint Michel illumine l'endroit.
Les commerçants sont cordiaux. Chaque année à Noël, celle qui tient la boutique de souvenirs propose des cartes de voeux fait main. Je ne manque jamais d'aller en chercher une, empruntant la route qui serpente au milieu des collines .
A gauche, un des gardes de Seborga en uniforme bleu et blanc.
A droite :Même après la disparition de Giorgio Ier
les ordres deSeborga restent présents à Seborga.