Capri, Anacapri
Dans le brouhaha du molo Baverello à Naples, il n'est pas difficile de trouver l'aliscafo pour Capri : il suffit de suivre la foule qui s'engouffre dans l'embarcation. Oubliées Ischia et Procida, ils n'ont sur les lèvres qu'un seul nom : Capri, l'île romantique par excellence. C'est vrai qu'avec son relief escarpé, ses aiguilles de pierres baignées par les flots azurés (les faraglioni), ses grottes lumineuses, ses petits chemins fleuris, sa flore sauvage, l'île ne manque pas d'attraits.
La Marina grande de Capri où arrivent tous les bateaux du continent draînant des milliers de touristes chaque jour.
Dès 29 av. JC, Auguste découvre cette colonie grecque sur la route du retour à Rome après ses campagnes orientales. Tibère (-42 av - 37 ap J.C.) la choisit comme lieu d'exil. Il y fera construire douze villas dont seuls les soubassements de la villa Jovis subistent, ainsi que le sinistre "saut de Tibère", une falaise d'où il précipitait ses ennemis. Il recevait aussi ses maîtresses dans les grottes bleues. L'une d'elles se visite toujours. Depuis la Marina grande où arrivent les hydroglisseurs, plusieurs compagnies proposent des excursions à la fameuse grotte bleue. L'affaire se révèle vite assez onéreuse car, ce qui n'est pas précisé, c'est que les voyageurs doivent payer en supplément le transfert sur une barque et l'entrée dans la grotte une fois arrivés sur place.
Sa couleur, proprement irréelle et inoubliable, provient de la réfraction de la lumière solaire pénétrant par voie sous marine sur les sables des fonds marins et sur les parois de la grotte. Il faut donc la visiter par une belle journée ensoleillée où l'air est limpide pour ne pas être déçu.
Autant le préciser, Capri est cher : 40€ Aller retour par personne depuis Naples pour 40 mn de traversée; si vous souhaitez voir la grotte bleue, il faudra débourser 18€ pour y aller et, surprise car l'on ne vous prénvient pas, 14€ pour entrer dans la grotte.
La Piazzetta où toutes les nationalités de la planète se croisent.
Tout le monde se retrouve piazza Umberto Ier dite aussi "la Piazzetta". Et en effet, c'est une petite place que l'on traverserait en quelques pas si la foule n'était pas si dense. Un monde en miniature : la tour de l'horloge, l'église Saint-Etienne, la mairie et toutes les nationalités de la planète. Autant de monde m'empêche d'apprécier les lieux, et c'est sans regret que je me dirige vers la première rue latérale. Dans ce dédale, les rues deviennent ruelles, les ruelles des venelles et les venelles des chemins.
En quelques minutes, je suis sur le chemin de la villa Jovis entouré de rosiers de Banks ( Rosa banksiae ), de lentisques et d'arbousiers. Plus loin, je distingue les côtes découpées de l'île. Des senteurs apparaissent, les parfums du maquis se mêlent à la brise marine, le brouhaha des touristes a laissé la place a un silence serein ponctué de chants d'oiseaux. Le charme de l'île commence à se dévoiler. Malheureusement, Anacapri est dans la direction opposée et je dois retourner à la Piazzetta pour prendre un minibus. Minibus car les routes sont étroites et les virages en épingle à cheveux se succèdent pour atteindre le sommet d'un plateau rocheux escarpé. C'est là que se trouve Anacapri.
Passé les premières boutiques de souvenirs, Anacapri vit au rythme d'un village. Bien sûr, les touristes sont présents mais ils se font plus discrets. Au bout de quelques mètres, l'on arrive à la Casa Rossa bâtie entre 1876 et 1899 autour d'une tour aragonaise par le général Jhan Mackowen de la Nouvelle Orléans. Sa façade rouge pompéien, ses fenêtres de style mozzarabe, l'utilisation de pierres de diverses origines tranchent avec les maisons de pêcheurs ou des paysans locaux.
Pavement de l'église Saint-Michel: toute la surface du sol est composée de carreaux de céramique représentant
le paradis terrestre avec l'expulsion d'Adam et Eve au centre.
Un peu plus loin, au fond d'une placette l'église Saint-Michel avec sa façade monochrome blanche n'attirerait pas l'attention si quelques touristes ne faisaient pas la queue devant. Terminée en 1719, elle était à l'origine rattachée à un couvent élevé par Domenico Vaccaro. Pourtant, elle abrite l'un des plus surprenants sols pavés de Campanie. Il est entièrement recouvert de carreaux de céramique représentant le paradis terrestre et l'expulsion d'Adam et Eve.
Arrivé dans le centre d'Anacapri, je suis pratiquement seul. Le calme enfin ! Certains escaliers de maisons sont entièrement recouverts de céramiques représentant des oiseaux. Tout autour de la piazza Diaz près de Santa Sofia, d'autres céramiques retracent le cycle de la vigne, de la plantation aux vendanges.
Attablé à une terrasse, je savoure chaque seconde, regrettant de n'avoir pas assez de temps pour m'aventurer dans les sentiers, dans les criques et sur les falaises à la recherche de la Capri bucolique de ces céramiques qui sédusit il y a quelques décennies, Picasso, Cocteau, Graham Greene et tant d'autres.
La principale occupation à Capri est le farniente. Savourer la vie devant un verre de vin...